par Chems Eddine Chitour
«Nous sommes dans la position d'un petit enfant entrant dans une immense bibliothèque dont les murs sont couverts jusqu'au plafond, avec des livres écrits dans de nombreuses langues différentes. L'enfant sait que quelqu'un a écrit ces livres. Mais il ne sait pas qui, ni comment. Et il ne comprend pas les langues dans lesquelles ils sont écrits... Telle est, je crois, l'attitude de l'esprit humain même le plus grand et le plus cultivé face à Dieu». ~ Einstein
En ce mois de Ramadan, je me sens un devoir de contribuer à proposer une nourriture spirituelle qui permet aux musulmans de raffermir une dimension verticale à Dieu. De tout temps les hommes se sont posé les questions suivantes, fruit d'une inquiétude légitime : «Qui sommes-nous ?» L'astrophysicien André Brahic avec son humour «scientifique» nous assure que «nous sommes les petits-enfants du Big Bang ?». D'où venons-nous ? Où allons-nous ? Comment expliquer l'ordre superbe de l'Univers, depuis la délicate harmonie d'une humble fleur des champs, jusqu'à la splendeur sombre de la voûte étoilée ? Les grandes civilisations qui ont vu le jour dans le continent asiatique, le sous-continent indien et au Moyen-Orient se sont toutes, chacune à sa façon, interrogées sur la formation de l'Univers. Suffit-il de laisser agir les lois de l'Univers pour qu'à partir du hasard naisse, naturellement, la vie ou faut-il imaginer qu'au-delà des choses visibles, il y a encore autre chose, une intelligence discrète, un horloger, qui animerait la matière et lui donnerait souffle ?
Le big bang et la mélodie secrète de l'Univers
D'après la science l'univers serait né il y a 13,82 millions d'années après une explosion initiale qualifié par le physicien Fred Hoyle par dérision de grand boum (big bang). Est-il gouverné par le hasard ou par un ordre profond ? Y avait-il quelque chose avant le Big Bang ? Qu'y avait-il avant la création de l'Univers ? De fait, la première lumière de l'Univers, le «Fiat Lux» de la Bible, semble réglée au millionième près. Par quel miracle ? Le Big Bang ne serait pas le commencement de tout ! On le voit d'une façon ou d'une autre on revient au mystère et quel rôle le hasard a-t-il pu jouer. Einstein avait l'habitude de dire que «Dieu ne joue pas aux dés».
Le cheminement vers le modèle du Big Bang ne se fit pas «sans douleur». L'astronome Edwin Hubble établit par ses observations au télescope en 1924 les observations de Hubble semblaient indiquer que l'Univers dans son entier était en expansion, depuis cet instant lointain où, pour la science, il avait jailli du néant. Le Big Bang nous fait découvrir une histoire imprévue et fantastique. Il a eu une naissance, grandiose, il grandit maintenant, et peut-être connaîtra-t-il un jour la vieillesse et la mort. Le récit «détaillé» de la création de l'Univers selon la science. Si l'on admet la théorie du «Big Bang», le film du déroulement de l'univers serait le suivant : à 0 seconde, l'Univers est né dans des circonstances inconnues et, peut-être, inconnaissables. Entre 10-43 et 10-35 seconde, les théories actuelles supposent une période d'«inflation» accélérée. La force qui a provoqué cette expansion est inconnue. Entre 10-35 et 10-12 seconde, l'«inflation» s'est arrêtée. La force motrice qui l'anime laisse derrière elle des particules élémentaires - électrons, quarks, gluons et neutrinos - dans un environnement où les températures sont inouïes (1027 degrés centigrades).
L'Univers continue à s'étendre et à se refroidir. À 10-11 seconde, la température baisse à un million de milliards de degrés centigrades. À 3000 degrés centigrades, les électrons sont capables de s'accrocher au noyau atomique de base. C'est là qu'intervient le champ de Higgs qui donne de la masse aux particules élémentaires. Entre 2 ou 3 milliards d'années, l'âge des ténèbres cosmiques prend fin avec la formation des premières étoiles de l'Univers, au cœur de denses nuages de gaz. Entre 5,5 et 10,5 milliards d'années, le Soleil est formé, ainsi que les planètes du système solaire. Sur les planètes les plus proches du Soleil - Mercure, Vénus, la Terre et Mars -, De 6,2 à 11,2 milliards d'années, «Il y a émergence de la vie sur Terre». Les toutes premières cellules commencent à peupler la terre. De 10 à 13,82 milliards d'années, des organismes multicellulaires se développent, aidés par l'avènement de la reproduction sexuée. Les premiers vertébrés apparaissent pendant l'Ordovicien. Suivent les dinosaures, les reptiles, les mammifères et les plantes. Il y a environ 700 000 d'années, des hominidés commencent à peupler l'Afrique. Homo sapiens se manifeste il y a plus de 100 000 ans. Le langage, la culture sont créés et les sociétés humaines organisées apparaissent. (1)
Les constantes cosmologiques - Le réglage fin de l'univers fine tuning
Aujourd'hui, à l'instant du Big Bang, l'Univers est encadré par une série de constantes cosmologiques qui gouvernent, à chaque instant, chaque étape de la naissance de la matière. À tel point que certains physiciens parlent de miracle car sa naissance est parfaitement ordonnée, Pour l'astrophysicien Trinh Xuan Thuan : «L'univers, écrit-il, se trouve avoir, très exactement, les propriétés requises pour engendrer un être capable de conscience et d'intelligence. Les astrophysiciens en construisant des modèles d'Univers, chacun avec sa propre combinaison de constantes et de conditions initiales, La question... qu'ils se sont posés pour chaque modèle d'univers est : héberge-t-il la vie et la conscience après une évolution de 13,7 milliards d'années ?» (2)
«La réponse est... la vaste majorité des univers possède une combinaison perdante (...) - sauf le nôtre. Le réglage fin de l'univers fine tuning est encadré par une vingtaine de constante précise à des dizaines de décimales. Pourquoi cela ? Le réglage fin de l'univers (fine-tuning) fait référence au fait que certaines constantes fondamentales de la nature (comme la constante gravitationnelle, la charge de l'électron, ou la constante cosmologique) sont ajustées avec une précision extrême. Si ces constantes variaient ne seraient-ce que d'une fraction infime, l'univers tel que nous le connaissons, avec ses étoiles, planètes et la vie, ne pourrait pas exister».
La précision des constantes fondamentales de l'univers est souvent illustrée par des analogies frappantes. Voici quelques exemples concrets qui mettent en perspective l'extrême finesse des réglages physiques nécessaires à l'existence de notre cosmos :
Imaginons que nous lançons une flèche depuis la Terre en visant une cible de 1 m² placé à l'autre bout de l'univers, soit à environ 13,8 milliards d'années-lumière. Si la constante gravitationnelle G était modifiée d'à peine 1 sur 1060 la formation des étoiles et des galaxies aurait été impossible. Cela revient à manquer cette cible de quelques centimètres après un trajet de milliards d'années-lumière.
Imaginons une imprimerie qui explose, projetant du papier, de l'encre et des caractères d'imprimerie dans tous les sens. L'explosion de l'imprimerie donnant naissance à un livre parfait De la même manière, un léger changement dans les constantes fondamentales rend impossible l'organisation de la matière en molécules complexes, en planètes, et en vie.
Au moment du Big Bang, la densité de l'univers devait être combinée avec une précision de 1 sur 1024 pour éviter soit un effondrement rapide, soit une expansion trop rapide correspondant à la formation des galaxies. C'est comme ajuster la masse d'un avion gros-porteur au gramme près pour qu'il puisse voler sans s'écraser. La constante cosmologique (Λ) qui régule l'expansion de l'univers a une précision 1 sur 10 120. C'est comme ajuster une balance pour qu'elle ne penche pas d'un côté avec une précision de 1 électron par rapport à toute la masse de l'univers.
Si la force nucléaire qui intervient dans la formation des atomes forte était seulement 2% plus faible, les protons et neutrons ne se lieraient pas pour former des noyaux d'atomes. Aucun élément lourd (carbone, oxygène, etc.), donc pas de chimie, pas de planètes, pas de vie. Si elle était 2% plus forte, tout l'hydrogène aurait fusionné en hélium trop rapidement, correspondant à la formation des étoiles et des planètes comme nous les connaissons. L'univers fonctionne comme une horloge cosmique ultra-précise. Un infime changement dans l'une des constantes rend tout cet équilibre impossible.
Certains voient dans ce réglage fin une indication en faveur d'un «dessein intelligent», arguant qu'un réglage aussi précis ne peut être dû au hasard. Ce réglage est-il dû au seul hasard ? En l'absence d'une explication définitive, le réglage fin demeure l'un des grands mystères de la physique et de la cosmologie. L'idée est que la précision extrême des constantes fondamentales ne peut pas être due au hasard et suggère l'existence d'un Créateur qui aurait réglé l'univers pour permettre l'apparition de la vie. L'univers semble conçu pour permettre l'émergence de la vie et de la conscience. À tel point que certains physiciens parlent de miracle car sa naissance est parfaitement ordonnée, ce qui a fait dire à Georges Smoot prix Nobel de physique, que «le Big Bang est l'évènement le plus cataclysmique que nous puissions imaginer, et à y regarder de plus près apparaît finement orchestré».
Pour l'astrophysicien Trinh Xuan Thuan : «L'univers, se trouve avoir, très exactement, les propriétés requises pour engendrer un être capable de conscience et d'intelligence. Les astrophysiciens peuvent créer des modèles d'Univers, chacun avec sa propre combinaison de constantes et de conditions initiales, La question... qu'ils se sont posés pour chaque modèle d'univers est : héberge-t-il la vie et la conscience après une évolution de 13,7 milliards d'années ?» La réponse est... «la vaste majorité des univers possède une combinaison perdante (...) - sauf le nôtre (...). Ce réglage est-il dû au seul hasard ? Ou bien résulte-t-il de la nécessité, si bien que les valeurs des constantes... sont les seules permises ?» (3)
La création de l'Univers selon les religions et La tentation du concordisme
Dans le droit fil de la connaissance scientifique, mais aussi de l'expérience humaine acquise pendant des millénaires, il est utile de connaître justement comment l'homme appréhendait l'espace et en général tout ce qui le remplissait de terreur, du fait qu'il n'a pas d'explication. La science, qui n'explique pas tout, laisse des multitudes de questions sur le démarrage de la création, sans réponse. Est-ce-là que la foi intervient pour «rassurer» le croyant «à tout prix» quant à l'omniprésence d'une force immanente ?
Le réglage fin peut être interprété de plusieurs manières, comme une indication d'un Créateur, il constitue un des arguments métaphysiques les plus puissants en faveur d'un principe organisateur transcendant. Sans Dieu, l'éthique peut être fondée sur la raison, l'humanisme ou les conventions sociales. Spinoza conçoit Dieu mais comme la nature elle-même, l'univers dans son ordre immuable. La liberté n'est pas d'échapper aux lois naturelles, mais de les comprendre et de ne plus être esclave des passions. Des Prix Nobel sont convaincus du design intelligent célèbres pour leurs travaux sur la cosmologie et la physique théorique, qui ont exprimé des idées en faveur du dessein intelligent. Ils incluent certains physiciens et cosmologistes comme Roger Penrose et Arno Penzias, Cependant certains scientifiques, y compris ceux qui ont reçu le prix Nobel, se montrent souvent prudents et nuancés sur la question.(3)
Les religions ont joué aussi un rôle dans la construction des civilisations en unifiant les populations sous des valeurs et des rituels communs. Elles servent d'outil de solidarité et d'identité collective. On le voit d'une façon ou d'une autre on revient au mystère et quel rôle le hasard a-t-il pu jouer. Einstein avait l'habitude de dire que «Dieu ne joue pas aux dés». Un grand physicien a comparé le Big Bang à un gigantesque incendie au cours duquel s'est constitué un livre en ce sens de ce qu'il y a de plus ordonné Ordo ab chao, l'ordre naît du chaos, trois mots qui renferment le plus grand mystère de l'Univers. Cette énergie unifiée de l'Univers représenterait la conscience divine qui est partout et en toute chose.
Dans la Bible comme lu sur Wikipédia on décrit le Tohu bohu concept apparaissant au second verset de la Torah et de la Bible. Dieu créa le monde en six jours le septième jour il se reposa. Le même récit se retrouve d'ailleurs dans le Coran. Pour le pape Pie XII, une fantastique explosion primordiale, projetant en un éblouissement toute la matière de l'Univers dans l'espace, est la caractéristique de la Création ! Le «fiat lux !» Le savant abbé belge Georges Lemaître, l'un des pères du Big Bang - qui avait, donc, un avis autorisé sur la question -, n'a pas succombé à la tentation du concordisme. Fatal au dogme, car la science peut désavouer demain sa vérité d'aujourd'hui, on trouve dans le Coran une cohérence d'ensemble qui semble «coller» à la réalité actuelle. Après la naissance de l'Univers, à partir de l'atome primitif, le Coran aborde l'étape de l'expansion ainsi que le révèle le passage suivant : «Le ciel, Nous l'avons construit par Notre puissance : et Nous l'étendons [constamment] : dans l'immensité. «Nous l'étendons», signifie : «Nous le rendons plus vaste, Nous lui donnons un volume plus grand»». (4)
Le docteur Maurice Bucaille, médecin de son état, à ce sujet : «Ce qui a été traduit par «Nous l'étendons», est le participe présent du verbe «musieûna» du verbe «awsaea» qui signifie : élargir, étendre, rendre plus vaste, plus spacieux, lorsqu'il s'agit d'objets» (5). Plus loin, il est dit dans le Coran : «La création des cieux et de la terre est quelque chose de plus grand que la création du genre humain, mais la plupart des hommes ne le savent pas !» (6). Le mot «Ratqan» signifie une masse compacte comme soudée. Le terme «Fafataqnahouma» s'applique à l'action de rompre avec une notion de puissance et de force. Nous avons donc bien la représentation d'une masse compacte qui a été désagrégée et dont les constituants formèrent l'univers avec tout son contenu.
Conclusion
C'est un fait ! La science progresse, les mystères aussi. Prenez la question la plus élémentaire : pourquoi y a-t-il quelque chose plutôt que rien ? La formidable théorie du Big Bang ne nous dit pas pourquoi, ni comment ce Big Bang est survenu. «Pourquoi l'Univers a-t-il cette apparence plutôt qu'une autre ? Pourquoi obéit-il à telle loi plutôt qu'à telle autre ? Une dose infinitésimale de gravitation en plus et l'univers aurait cessé son expansion. Pour le physicien Lawrence Krauss, la gravitation avait autant de chances d'aboutir à la création du cosmos, qu'un humain de deviner le nombre d'atomes qui composent le soleil. Reste l'énigme de la vie». (7), (8)
«Les religions offrent des rites et des pratiques qui donnent un cadre à la vie humaine (naissance, mariage, mort, fêtes, prières, méditation). Même dans un monde athée, des formes de spiritualité subsistante. Les croyances religieuses apportent du réconfort en temps de crise, face à la souffrance ou à la mort. L'idée d'un au-delà ou d'un plan cosmique donne de l'espoir et apaise l'angoisse existentielle. La prière et la méditation ont des effets apaisants prouvés. Même dans les sociétés modernes, la culture reste imprégnée de symboles religieux. Les religions ont joué et jouent encore plusieurs rôles fondamentaux dans les sociétés humaines. D'abord un cadre moral et éthique ce qui est bien ou mal et régulant les comportements sociaux permet la cohésion et l'ordre dans les sociétés humaines». (9)
Dans le droit fil de la connaissance scientifique, mais aussi de l'expérience humaine acquise pendant des millénaires, il est utile de connaître justement comment l'homme appréhendait l'espace et en général tout ce qui le remplissait de terreur, du fait qu'il n'a pas d'explication. La science, qui n'explique pas tout, laisse des multitudes de questions sur le démarrage de la création, sans réponse. Est-ce-là que la foi intervient pour «rassurer» le croyant «à tout prix» quant à l'omniprésence d'une force immanente ? Ou est-ce que nous sommes en présence d'une loterie ? Tout aurait pu ne pas avoir lieu. On est tenté de prendre à notre compte la fameuse phrase du philosophe Jean Guitton : «L'absurdité de l'absurde conduit vers le mystère». Dans le Coran, «Al ghaib», le mystère, appartient à Dieu.